Ouganda : Le Parlement tire la sonnette d’alarme sur l’état des routes et la hausse des accidents

Les parlementaires ougandais ont exprimé leur vive inquiétude quant à l’état des routes dans tout le pays, évoquant des tronçons délabrés, des projets inachevés, des compensations retardées et l’incapacité de l’Autorité nationale des routes de l’Ouganda (UNRA) à utiliser les budgets qui lui sont alloués. La dégradation des infrastructures routières et l’augmentation du nombre de morts ont dominé les débats lors de la séance plénière du Parlement, les députés réclamant des mesures urgentes du gouvernement pour combler les lacunes de financement, relancer les travaux bloqués et améliorer la sécurité routière.

Lors de la plénière du mercredi 6 août 2025, la présidente du Parlement, Anita Among, a lancé un appel pour une approche plus proactive et globale en matière d’entretien et de sécurité routière, après une série d’accidents tragiques, dont celui survenu dans la nuit de mardi sur la route Hoima–Buliisa, à Kigorobya, qui a coûté la vie à au moins 20 commerçants et fait plusieurs blessés.

« Alors que nous nous efforçons d’améliorer l’état des routes, nous devons également insister sur la sécurité routière », a déclaré Anita Among.

Elle a cité le rapport annuel sur la criminalité de 2024 publié par la police ougandaise, qui recense 25 107 accidents de la route et 25 808 victimes. Selon elle, les conditions routières dangereuses combinées à des comportements imprudents et à une application laxiste des lois créent une situation mortelle.

Les parlementaires ont dénoncé la situation alarmante des routes du pays, pointant du doigt des tronçons impraticables, des projets au point mort, des indemnisations non versées et l’inefficacité de l’UNRA à mobiliser les budgets disponibles.

Le député de Kyaka Central, l’honorable Bright Amooti, a déploré l’état de la route Kyegegwa–Kakumiro, où plus de 15 camions sont immobilisés à cause de l’impraticabilité de la voie.

« Cette route est gérée par la station de Fort Portal de l’UNRA, mais elle n’est plus opérationnelle », a-t-il souligné.

L’honorable Gorreth Namugga (NUP, Mawogola Sud) a exigé un financement immédiat pour des besoins cruciaux, notamment 1 100 milliards de shillings d’arriérés et 850 milliards pour l’entretien périodique.

« Nous sommes ici pour obtenir des fonds. Nous ne sommes pas là pour nous lamenter », a-t-elle martelé.

En réponse aux préoccupations, le ministre des Travaux publics et des Transports, le général Edward Katumba Wamala, a mis en garde contre les pertes budgétaires croissantes si l’on ne s’attaque pas rapidement au retard dans l’entretien des routes.

« La réhabilitation coûte environ 2,59 milliards de shillings par kilomètre, soit trois fois le coût de l’entretien périodique. Si nous n’agissons pas, nous pourrions subir une perte évitable pouvant atteindre 180 milliards de shillings », a-t-il averti.

Il a révélé que son ministère fait face à un déficit de financement de 2 472 milliards de shillings pour l’exercice 2025/2026, dont 1 071 milliards d’arriérés et 443 milliards nécessaires à l’acquisition de terrains. En juillet 2025, 27 projets routiers – 18 financés par le gouvernement et neuf par des bailleurs – étaient au ralenti ou à l’arrêt à cause de retards de paiement et d’un manque de financements complémentaires.

Le ministre a toutefois indiqué que des entreprises avaient été engagées pour plusieurs routes, dont Mityana–Mubende, Nebbi–Arua, Ishaka–Mbarara et Mpondwe. Concernant la route Kyegegwa–Kyenjojo, une équipe qui travaillait auparavant sur la route de Jinja a été redéployée pour réhabiliter ce tronçon.

La présidente Among a néanmoins soulevé des préoccupations plus larges concernant la qualité des routes et la dépendance de l’Ouganda aux financements extérieurs.

« La plupart de nos routes ne tiennent pas dans le temps. Et lorsqu’on les réhabilite, nous sommes encore en train de rembourser les prêts contractés pour leur construction », a-t-elle déploré, en référence à une récente directive présidentielle appelant à réduire la dépendance au financement des donateurs.

Among a dressé une liste de routes autrefois fonctionnelles aujourd’hui en mauvais état, dont Mityana–Mubende, Mukono–Jinja, Ibanda–Mbarara et Mbarara–Ishaka. Elle a révélé que le président Museveni avait demandé au ministre des Finances de débloquer 3 200 milliards de shillings spécifiquement pour ces axes.

Le ministre Katumba a également précisé que 23 stations régionales sont désormais opérationnelles après résolution des problèmes de personnel, ce qui devrait renforcer les efforts d’entretien routier en cours.

Le débat s’est ensuite tourné vers la sécurité routière, les députés avertissant que les infrastructures dégradées, la conduite imprudente, le manque de signalisation et l’absence de régulation du transport aggravent la crise.

Le député de Kalungu Ouest, l’honorable Joseph Ssewungu, a appelé la Commission des infrastructures physiques à donner la priorité au marquage et à la signalisation des routes pour améliorer la visibilité, notamment de nuit.

La députée de la circonscription féminine du district de Rakai, l’honorable Juliet Kinyamatama, a proposé la mise en place d’un système de transport plus abordable et fiable pour les commerçants, dénonçant les coûts élevés du transport actuel qui obligent à des solutions improvisées dangereuses.

Le ministre d’État aux Affaires intérieures, l’honorable David Muhoozi, a reconnu de graves lacunes dans l’application de la sécurité routière et promis une stratégie globale.

« Il y a de bons agents de la circulation, mais aussi des brebis galeuses. Nous envisageons de créer une unité d’inspection dédiée à la sécurité routière et d’étendre la couverture des caméras de surveillance pour contrôler les comportements à risque », a-t-il annoncé devant l’Assemblée.

La présidente Among a conclu que le Parlement devait désormais assurer un suivi rigoureux afin de s’assurer que la question des routes soit véritablement prise en main.