By Sipho Mhaga, Customs and Excise Specialist at SNG Grant Thornton
Les accords commerciaux sont l’un des piliers fondamentaux de la stratégie économique sud-africaine. Ils déterminent l’accès aux marchés, les flux d’investissements et la compétitivité internationale du pays. Si les discussions mondiales sur le commerce se concentrent souvent sur les négociations impliquant les États-Unis, le Canada, le Mexique ou la Chine, l’Afrique du Sud doit, quant à elle, porter son attention sur ses propres accords commerciaux pour tirer parti des opportunités émergentes et limiter les risques potentiels.
Avec la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), l’Union douanière d’Afrique australe (SACU) et l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), le paysage commercial sud-africain est façonné par des cadres qu’il est essentiel de comprendre et d’exploiter pour naviguer dans une économie mondiale de plus en plus complexe.
L’importance des accords commerciaux
Les accords commerciaux facilitent l’échange de biens et de services entre les pays en réduisant les droits de douane et autres obstacles freinant la croissance économique. Jadis basés sur le troc, ces accords sont aujourd’hui structurés et fondés sur des échanges équitables. La participation de l’Afrique du Sud à des accords comme l’AGOA et la SACU permet aux entreprises d’accéder à des marchés internationaux dans des conditions préférentielles, stimulant ainsi la croissance, le développement économique et la création d’emplois.
Par exemple, l’AGOA offre aux exportateurs sud-africains un accès en franchise de droits au marché américain pour certains produits, ce qui bénéficie particulièrement aux secteurs de l’agriculture, de l’automobile et de l’exploitation minière. Toutefois, le caractère non réciproque de l’AGOA rend l’Afrique du Sud vulnérable aux évolutions de la politique américaine. Les tensions diplomatiques récentes – illustrées par l’expulsion de l’ambassadeur sud-africain par les États-Unis – montrent à quel point la dynamique commerciale peut changer rapidement, compromettant potentiellement l’accès au marché. La perte des préférences de l’AGOA exposerait les exportations sud-africaines à des droits de douane plus élevés aux États-Unis, affectant gravement leur compétitivité face à des pays aux coûts moindres et à des chaînes d’approvisionnement plus efficaces.
Les défis liés aux accords commerciaux
Les accords commerciaux présentent également plusieurs défis, notamment en ce qui concerne le respect des réglementations internationales. Pour les entreprises sud-africaines, en particulier les PME, répondre aux exigences juridiques et administratives complexes peut s’avérer très coûteux en ressources. Le respect des normes élevées pour l’exportation, comme les règles sanitaires et phytosanitaires strictes dans l’agriculture, nécessite des investissements considérables en contrôle qualité et en documentation.
Autre problème majeur : les obstacles logistiques et infrastructurels entravent l’efficacité du commerce. Les ports sud-africains et certains postes frontières, comme celui de Beitbridge, souffrent de congestion et d’inefficacité, ce qui affecte négativement le commerce avec les pays voisins. Les retards dans les procédures douanières et les coûts de transport élevés réduisent aussi la compétitivité des exportations sud-africaines, en particulier pour les petites entreprises qui souhaitent accéder aux marchés extérieurs.
Élargir le commerce au-delà des partenaires traditionnels
Dans ce contexte, il est crucial pour l’Afrique du Sud de renforcer activement ses relations commerciales intra-africaines. La ZLECAf constitue une opportunité historique pour créer un marché africain unifié, réduire les barrières commerciales sur le continent et promouvoir l’intégration économique. L’Afrique du Sud a récemment commencé à commercer sous régime préférentiel dans le cadre de la ZLECAf, ce qui permet des exportations en franchise de droits ou à droits réduits vers 12 pays africains. Toutefois, le manque d’infrastructures, les disparités réglementaires et les barrières non tarifaires freinent encore la croissance.
Pour tirer pleinement parti de la ZLECAf, l’Afrique du Sud – comme les autres pays africains – doit investir dans la logistique et l’efficacité de ses frontières. Moderniser les procédures douanières, réduire la bureaucratie et renforcer les réseaux de transport permettra de fluidifier les échanges. La résolution des goulets d’étranglement réglementaires aidera également les PME à mieux participer au commerce régional, favorisant ainsi une croissance plus inclusive.
Au-delà de l’Afrique, les relations avec les pays BRICS offrent également des perspectives intéressantes. Si la Chine reste un partenaire majeur, d’autres marchés BRICS représentent un potentiel encore largement inexploité pour les exportateurs sud-africains, notamment dans les secteurs des minerais, de l’industrie manufacturière et de l’agriculture. Cependant, les barrières non tarifaires, comme les exigences rigoureuses du Brésil sur les équipements médicaux, doivent être surmontées pour exploiter pleinement ces opportunités.
Orientations politiques et stratégies commerciales futures
Pour rester compétitive à l’échelle mondiale, l’Afrique du Sud doit adopter une approche stratégique de ses politiques commerciales. Les investissements récents de l’Union européenne, à hauteur de 4,7 milliards d’euros dans les énergies vertes et la production de vaccins, illustrent les possibilités de diversification des échanges et d’attraction d’investissements étrangers. Il est essentiel de capitaliser sur cette dynamique positive.
Le gouvernement semble amorcer des efforts dans ce sens, comme le montre sa récente décision d’investir 1 milliard de rands dans la production locale de véhicules électriques (VE), un signal d’alignement avec les tendances mondiales en matière de durabilité – ce qui pourrait à terme améliorer la position concurrentielle du pays. Néanmoins, beaucoup reste à faire. Le récent budget national a révélé un manque de moyens financiers pour soutenir ces ambitions. Peu d’initiatives concrètes ont été annoncées pour stimuler la croissance économique via la facilitation des échanges.
Un avenir encore possible fondé sur une croissance commerciale stratégique
Malgré les obstacles, l’Afrique du Sud dispose encore d’une opportunité unique de se repositionner comme un leader du commerce africain – et au-delà. En adoptant des processus douaniers numériques, en renforçant les réseaux commerciaux régionaux et en s’appuyant sur les partenariats public-privé, le pays peut créer un environnement commercial plus agile et plus résilient. Un environnement qui ne se contente plus de réagir aux évolutions mondiales, mais qui utilise stratégiquement les accords commerciaux pour façonner son propre avenir économique, ainsi que celui du continent africain.
Source : LOGISICS NEWS