Les ports du Maroc peuvent redessiner la carte du commerce maritime au Sahel

Le Maroc devient une option de plus en plus sérieuse dans la quête de diversification des débouchés maritimes des 3 pays de l’AES.  Ces derniers ont enclenché des démarches en ce sens.

Les ports marocains pourraient s’inviter dans la compétition portuaire en cours en Afrique de l’Ouest pour le trafic transit à destination du Niger du Mali et du Burkina Faso, enclavés et en quête de nouveaux débouchés maritimes notamment suite à une phase de tensions diplomatiques avec leurs partenaires historiques en la matière au sein de la communauté économique (Côte d’Ivoire, Bénin, etc.).

L’accès des ports atlantiques marocains a été au cœur des discussions entre le Royaume chérifien et une délégation composée entre autres des ministres des Affaires étrangères des 3 pays de l’AES. Cette perspective évoquée depuis 2023 constitue selon certains analystes un élément pouvant redessiner l’actuelle carte de l’écosystème commercial maritime du Sahel.

Une option qui pourrait changer la donne

Les trois pays constituent en effet l’hinterland régional des ports côtiers ouest-africains. Ils sont aussi les principaux clients de certaines plateformes de la région, drainant une part non négligeable du trafic annuel. Selon les données officielles, près du tiers du trafic au port de Cotonou était à destination du Niger avant la brouille diplomatique avec la CEDEAO qui vu la fermeture des frontières entre les deux pays et le blocage des flux commerciaux.

Plus de 80% du trafic transit de la plateforme de Lomé est destiné au Burkina Faso qui constitue également un important client des ports d’Abidjan (Côte d’Ivoire) et de Tema (Ghana). La plateforme de Dakar assure quant à elle l’essentiel des volumes en transit vers le Mali.

Les interactions parfois complexes de cette toile géo-économique traduisent l’intensification de la compétition entre les ports, qui ont tous fait l’objet d’investissements massifs ces dernières années pour étendre les capacités, complétés par des projets routiers et d’infrastructures pour réduire les contraintes logistiques. L’entrée du Maroc dans cette course pourrait fragmenter davantage ce marché.

Les atouts du Maroc

Avec le complexe portuaire de Tanger Med considéré comme le plus performant d’Afrique, le Maroc se présente déjà comme un passage clé pour les géants de l’industrie commerciale maritime desservant la côte ouest du continent. Le royaume dispose aussi de compagnies privées et publiques pouvant assurer les services de cabotage et la navigation régionale vers les ports voisins.

Avec ses nombreux ports secondaires et des installations logistiques diversifiées, les volumes en transit transbordés vers les différents débouchés pourraient bénéficier de services logistiques conséquents. En revanche, un rythme plus soutenu du trafic nécessiterait d’autres investissements pour étendre davantage les capacités.  

Des contraintes géographiques et sécuritaires

D’un point de vue géographique, les possibilités de fret entre le Maroc et les 3 pays de l’AES se heurtent dans un premier scénario au passage par le Sahara Occidental, une région séparatiste sur le territoire marocain, pour poursuivre le trajet vers le Mali. Le second scénario prévoit quant à lui un accostage direct aux ports mauritaniens.

Pour les expéditions vers le Burkina Faso et le Niger en particulier, le trajet devrait donc se rallonger en raison de l’obligation de transiter par le Mali. Une option qui, en plus d’alourdir les contraintes logistiques, comporte aussi des risques sécuritaires en raison de la présence de groupes terroristes dans certaines régions.

Source : Agence Ecofin