Mesures de l’Afrique du Sud en réponse aux droits de douane américains
Bien que les mesures actuelles posent des défis, elles offrent également des opportunités pour renforcer et accélérer la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et développer de nouveaux partenariats.
Depuis le début de la 7e Administration, l’Afrique du Sud s’est engagée dans un processus de stabilisation et de renforcement de relations commerciales et d’investissement mutuellement bénéfiques avec les États-Unis. L’objectif était de résoudre des problèmes bilatéraux de longue date préoccupant les deux parties, de manière à faire progresser les relations commerciales. L’Afrique du Sud a engagé des discussions avec les États-Unis à divers niveaux afin de garantir une certaine prévisibilité dans les échanges. Toutefois, malgré ces efforts, les États-Unis ont décidé d’imposer unilatéralement un droit de douane de 30 % sur les produits sud-africains. Il est regrettable que les efforts de ce gouvernement pour réinitialiser les relations avec les États-Unis aient été sapés par certains acteurs au sein de la société sud-africaine.
Ces droits de douane ont été appliqués malgré la soumission, en mai 2025, par l’Afrique du Sud, d’un accord-cadre complet et ambitieux visant à réduire le déficit commercial des États-Unis, à aborder les questions tarifaires, à promouvoir le commerce numérique, à renforcer les relations commerciales, à favoriser l’investissement et à éliminer les barrières non tarifaires pour améliorer les échanges mutuellement bénéfiques entre les deux pays.
Les droits de douane unilatéraux de 30 % sur les importations étrangères concernent divers partenaires commerciaux des États-Unis et seront appliqués à partir de 00h01 (heure de l’Est) le 8 août 2025. Le décret exécutif américain précise que les marchandises chargées sur un navire avant cette heure et déjà en transit, puis importées ou retirées de l’entrepôt avant le 5 octobre 2025 à 00h01 (heure de l’Est), ne seront pas soumises à ces nouveaux droits supplémentaires mais resteront assujetties au tarif précédent de 10 %.
Les États-Unis sont le troisième partenaire commercial de l’Afrique du Sud, après l’Union européenne et la Chine. Ils représentent 7,5 % des exportations mondiales de l’Afrique du Sud. Nous continuerons donc à dialoguer avec les États-Unis en vue de conclure un accord bénéfique aux deux pays. L’Afrique du Sud cherche à conclure des accords favorisant la création de valeur et l’industrialisation, et non des relations extractives rappelant les modèles commerciaux coloniaux qui empêchent la valorisation locale de nos ressources minières.
Avec une part minime de 0,25 % dans les importations totales américaines, l’imposition d’un tarif de 30 % à l’Afrique du Sud semble injustifiée, d’autant plus que ces tarifs sont appliqués de manière indiscriminée à tous les partenaires commerciaux des États-Unis. De plus, l’Afrique du Sud ne constitue aucune menace pour l’économie ou la sécurité nationale des États-Unis. Le calcul du déficit commercial États-Unis/Afrique du Sud ne tient pas compte de l’excédent substantiel des États-Unis dans les services, ni de la nature complémentaire des relations bilatérales commerciales et d’investissement.
Les exportations sud-africaines ne concurrencent pas les producteurs américains et ne menacent pas leur industrie. Au contraire, elles sont des intrants essentiels pour la base industrielle américaine. Nos produits agricoles sont même contre-saisonniers, ce qui signifie qu’ils comblent des lacunes sur le marché américain sans remplacer les produits locaux.
L’Afrique du Sud n’est pas seulement un partenaire commercial, c’est aussi un investisseur majeur aux États-Unis, avec des entreprises sud-africaines qui y soutiennent des emplois. De même, plus de 600 entreprises américaines présentes en Afrique du Sud participent à notre croissance industrielle et à la création d’emplois. Notre objectif est de préserver et renforcer ces relations mutuellement bénéfiques.
Impact des droits de douane
L’incertitude entourant ces nouveaux tarifs est déjà prise en compte dans les prévisions économiques. Des économistes estiment qu’ils pourraient réduire la croissance économique sud-africaine de 0,2 %. Cette baisse dépendra de plusieurs facteurs, notamment la capacité à identifier de nouveaux débouchés. Il convient de noter que 35 % des exportations sud-africaines restent exemptées de ces droits. Toutes les exemptions prévues dans le précédent décret exécutif américain restent en vigueur : cuivre, produits pharmaceutiques, semi-conducteurs, bois, certains minéraux critiques, ferraille d’acier inoxydable, énergie et produits énergétiques.
Depuis 2018, les entreprises sud-africaines s’étaient déjà adaptées aux droits de douane américains de la Section 232 sur l’acier et l’aluminium, faute d’exemption nationale. Toutefois, cette nouvelle incertitude politique accroît l’instabilité commerciale et pourrait affecter nos exportations.
Le nouveau régime tarifaire américain rompt avec un environnement commercial à faibles droits de douane. Ce changement de cap, qui touche non seulement l’Afrique du Sud mais aussi le monde entier, redéfinit profondément le paysage du commerce mondial.
Mesures de réponse
Poursuite des négociations avec les États-Unis
L’Afrique du Sud s’engage dans une approche de principe, utilisant tous les canaux diplomatiques disponibles pour négocier un accord commercial mutuellement avantageux avec les États-Unis, respectueux de nos intérêts nationaux et de notre partenariat de longue date. Cet accord visera à préserver l’intégration régionale et le tarif extérieur commun de la SACU, qui représente 9 % de nos exportations mondiales.
Le gouvernement travaille avec le secteur privé pour ajuster certains éléments de l’accord-cadre afin d’améliorer la prévisibilité du commerce.
Mise en œuvre d’un plan de réponse économique, comprenant :
a) Création d’un guichet de soutien à l’exportation, qui servira de point de contact pour les entreprises touchées par la hausse des droits. Il visera à soutenir la diversification des marchés d’exportation, à fournir des informations sur les destinations alternatives, les exigences de conformité et les contacts avec les missions diplomatiques sud-africaines.
b) Mesures pour aider les entreprises à absorber le choc tarifaire et à favoriser des stratégies de résilience et de croissance à long terme pour protéger l’emploi et les capacités productives. Détails à venir.
c) Soutien via le Fonds de Localisation (LSF), en collaboration avec le ministère de l’industrie (dtic), l’IDC et d’autres agences. Un appel à candidatures sera lancé aux entreprises opérant dans les chaînes de valeur concernées.
d) Programme de soutien à l’exportation et à la compétitivité (ECSP), incluant un fonds de roulement et un fonds pour les équipements industriels, afin de répondre aux besoins à court et moyen terme.
e) Mesures d’atténuation des pertes d’emploi, en partenariat avec le ministère du Travail, mobilisant notamment le Fonds d’assurance chômage (UIF) ajusté aux circonstances actuelles.
Exemption sectorielle pour les exportateurs
La diversification des marchés nécessitera sans doute une coordination entre exportateurs : infrastructures communes, partage d’information, économies d’échelle, etc. Ces pratiques pourraient enfreindre la loi sur la concurrence. Après consultation avec la Commission de la concurrence, le ministre a introduit une exemption sectorielle (Block Exemption) pour permettre cette collaboration. Un projet d’exemption sera publié d’ici la fin de la semaine pour accélérer sa mise en œuvre.
Diversification des marchés
Nous avons renforcé nos partenariats commerciaux et d’investissement avec de nombreux pays en Afrique, Asie, Europe, Moyen-Orient et Amériques.
L’annonce du partenariat pour un commerce et un investissement propres avec l’Union européenne, en mars, a permis de mobiliser un plan d’investissement de 90 milliards de rands, avec des opportunités d’accès au marché pour les carburants d’aviation durables (SAF) et les véhicules hybrides/électriques.
Dans un contexte commercial mondial difficile, l’Afrique du Sud développe activement un secteur agricole résilient. Des marchés tels que la Chine et la Thaïlande sont désormais ouverts à des produits sud-africains comme les agrumes. Avec un marché chinois estimé à 200 milliards de dollars, ces avancées ouvrent de vastes opportunités.
Sous l’égide coordonnée de la Présidence, du DIRCO et du dtic, nous faisons également des percées significatives sur les marchés dynamiques d’Asie et du Moyen-Orient (Émirats arabes unis, Qatar, Arabie saoudite), tout en préservant nos partenaires historiques.
Nous avons aussi établi des paquets commerciaux et d’investissement avec plusieurs pays, dont le Japon, pour ouvrir de nouveaux débouchés.
Conclusion :
Bien que les mesures actuelles posent des défis, elles offrent aussi des opportunités pour accélérer la mise en œuvre de la ZLECAf et explorer des marchés encore peu exploités, comme l’ASEAN et la Turquie.